Les contes populaires russes
 
KOLOBOK
La petite galette ronde
 
par Alexandre Nicolaïevitch AFANASSIÈV
(1826 - 1871)
 
Traduction Lise Gruel-Apert
 
 
 
 L ÉTAIT UNE FOIS un vieux et une vieille. Le vieux dit :
 
« Et si tu faisais cuire une petite galette ronde, la vieille ? — Avec quoi ? Il n'y a plus de farine ! —
 


 

Mais si, la vieille ! Retourne le sac, racle la boîte, cela en fera toujours un peu ! »
 
 
La vieille prit un grattoir, elle retourne le sac, racla la boîte et elle ramassa bien deux petites poignées de farine.
 
Elle les mélangea à de la crème, fit frire le tout dans de l'huile chaude
 
 

et posa la galette à refroidir sur la fenêtre.

 
La galette resta là longtemps, longtemps sans bouger et, tout à coup, elle se mit à rouler.
 
 


Toujours roulant, la voilà sur le banc, puis sur le plancher et bientôt près de la porte ; alors, elle franchit le seuil d'un bond, se retrouva sur le perron
 
 

et traversa la cour jusqu'au portail. La voilà qui passe le portail et qui prend la clef des champs.
La galette roule sur le chemin. Un lièvre vint a passer :
 

« Petite galette, petite galette, je vais te manger ! — Non, lièvre bigle, tu ne me mangeras pas, écoute plutôt ma chanson ! » et la galette entonna :
Je viens du sac qu'on a retourné,
Je viens de la boîte qu'on a raclée ;
On m'a mélangée à de la crème,
On m'a frite dans de l'huile chaude
Et on m'a refroidie sur la fenêtre ;
J'ai échappé à grand-père,
J'ai échappé à grand-mère,
Crois-tu, levraut, que je ne t'échapperai pas ?
 
 
Et elle avait disparu avant que le lièvre ait dit ouf.
La petite galette roule sur le chemin, voit s'avancer un loup :
 
 
« Petite galette, petite galette, je vais te manger ! — Ne me mange pas, loup gris, écoute plutôt ma chanson :
 
Je viens du sac qu'on a retourné,
Je viens de la boîte qu'on a raclée ;
On m'a mélangée à de la crème,
On m'a frite dans de l'huile chaude
Et on m'a refroidie sur la fenêtre ;
J'ai échappé à grand-père,
J'ai échappé à grand-mère,
J'ai échappé au lièvre bigle,
Crois-tu, loup gris, que je ne t'échapperai pas ?
 
 
Et elle avait disparu avant que le loup ait dit ouf.
 
Elle roule, roule, croise ours :
« Petite galette, petite galette, je vais te manger ! — Qu'est-ce que tu te figures, gros balourd !
 
 
Je viens du sac qu'on a retourné,
Je viens de la boîte qu'on a raclée ;
On m'a mélangée à de la crème,
On m'a frite dans de l'huile chaude
Et on m'a refroidie sur la fenêtre ;
J'ai échappé à grand-père,
J'ai échappé à grand-mère,
J'ai échappé au lièvre bigle,
J'ai échappé au loup gris,
Crois-tu, pataud, que je ne t'échapperai pas ?
 
 
 
Et elle avait disparu avant que l'ours ait dit ouf.
 
Elle roule, roule, devant elle, surgit la renarde :
« Bonjour, petite galette, comme tu es jolie ! »
 
 
La petite galette entonne sa chansonnette :
 
Je viens du sac qu'on a retourné,
Je viens de la boîte qu'on a raclée ;
On m'a mélangée à de la crème,
On m'a frite dans de l'huile chaude
Et on m'a refroidie sur la fenêtre ;
J'ai échappé à grand-père,
J'ai échappé à grand-mère,
J'ai échappé au lièvre bigle,
J'ai échappé au loup gris,
J'ai échappé à l'ours pataud,
Crois-tu, renarde, que je ne t'échapperai pas ?
 
 
« Quelle merveilleuse petite chanson !, s'exclama la renarde. Quel malheur que je sois vieille et sourde ! Si tu voulais te mettre sur mon museau et me la rechanter, quel plaisir tu me ferais ! »
 
La petite galette sauta sur le museau de la renarde et recommença à chanter.
« Merci, petite galette ! Quelle belle petite chanson ! Comme je voudrais encore l'entendre ! Mets-toi sur ma langue et chante-la moi encore une fois ! » dit la renarde en tirant la langue.
 
Bêtement, la galette sauta dessus, et hop ! La renarde l'avala d'un coup.
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 



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